La musique - gestation et développement
L'Islande, isolée du continent et sous la domination du Danemark, ne possédait avant la fin du XIXe siècle aucune des ressources nécessaires à une vie musicale : il n'y avait par le passé aucune cour, aucune aristocratie, donc aucune tradition de financement d'oeuvres musicales telles que cantates, ballets ou opéras. La musique s'y présentait sous la forme vocale uniquement et était liée à un texte : psaume, chanson de geste, légende.
On peut dire que le moyen âge de la musique islandaise s'est prolongé jusqu'au milieu du XVIIIe siècle : des siècles de silence, la musique orale ne survivant que par son texte. Cette tradition cessa avec l'interdiction de musique de danse en Islande par un édit du roi du Danemark au XVIIIe siècle et qui était en vigueur pendant 30 ans. L'histoire nous dit qu'il y avait des raisons économiques à cette décision, à savoir qu'à la suite des bals populaires il naissait trop d'enfants illégitimes..., donc en arrière la musique !
Après cette interdiction il restait les "rímur", de longs poèmes narratifs chantés comme un long récitatif un peu nasal pour l'amusement des gens pendant le travail manuel des longues soirées d'hiver. Aujourd'hui l'ensemble Sigur Rós puise dans cette tradition avec des rímur basés sur des Eddas apocryphes, avec le succès que l'on sait. Les sujets des rímur étaient tirés de romans chevaleresques et accompagnés par un instrument à cordes, le "langspil". On pratiquait aussi une forme de chant à deux voix, marqué par des quintes parallèles, le croisement de voix et sur le mode lydien, si typique, non seulement de certaines musiques antiques, mais de la musique islandaise. Les textes étaient religieux ou profanes.
Pendant le carême on chantait surtout les Psaumes de la Passion du poète et homme de Dieu, Hallgrímur Pétursson.
Le "vikivaki", danse folklorique, disparut au XVIIIe siècle, bien que l'on retrouve encore quelques exemples, notamment dans les îles Féroé. L'origine du mot vient de "vaka" signifiant "veiller".
La décennie de 1830-1840 a été en Islande, comme en France, une période d'éveil national et de mouvements de libération. Les poètes islandais, formés sur le continent, écrivaient des chants patriotiques sur des airs danois ou allemands, très loin de la musique traditionnelle.
Vers 1870 Pétur Gudjohnson devient organiste de la cathédrale et renouvelle la musique religieuse et chorale, suivi par Jónas Helgason qui compose le premier air populaire islandais "Andvarp" (Soupir). Le plus célèbre des compositeurs est probablement Sveinbjörn Sveinbjörnsson, puisqu'il a composé l'hymne national et des chansons à caractère folklorique, en plus de sa musique de chambre et vocale dans le style de Mendelssohn. En 1900 il n'y avait aucun débouché pour un musicien professionnel. Pourtant de nombreux amateurs, paysans, médecins, marchands, pasteurs et professeurs écrivirent des mélodies selon les modèles danois et allemand, très populaires à l'époque.
Au moment de la Grande Guerre, Pall Isólfsson, Jón Þorleifsson et Sigurður Þórðarson jettent les bases d'une musique professionnelle en Islande. Le premier, organiste virtuose, ne se considérait pas comme compositeur, malgré sa Cantate de l'Althing, ses pièces pour orgue et musique de scène. Il écrit dans la tradition de Brahms et Reger, et même si l'on trouve des échos de la musique folklorique islandaise, il est essentiellement un musicien internationaliste. Le nationaliste Jón Leifs est aux antipodes, avec une exploitation savante - et parfois contestée - des éléments musicaux islandais dans d'importantes oeuvres orchestrales (Saga Symphonie) et chorales ((Edda Oratorio, Requiem). Chef d'orchestre formé en Allemagne il dirigera le premier concert symphonique en Islande en 1926. Après la deuxième guerre il fondera la société des compositeurs islandais (STEF). L'an 2000, lorsque Reykjavík était capitale culturelle, a vu la première mondiale de "Baldur" de Jón Leifs, drame musical en deux actes, monté ensuite à Bergen et Helsinki. Quant à Sigurður Þórðarson, il a surtout exercé une grande influence en qualité d'administrateur. Il composa aussi la première opérette islandaise.
C'est à partir des années 30 que se forment des ensembles musicaux et ce n'est qu'en 1950 que fut créé l'orchestre symphonique d'Islande. Les années 60 étaient l'âge d'or pour les instrumentistes. En 1968 Vladimir Ashkenazy s'installe en Islande et fonde le Festival de Reykjavík, qui est aujourd'hui une manifestation d'envergure. L'enseignement musical se répand rapidement et en 1974, 12 membres de l'orchestre symphonique fondent l'orchestre de chambre de Reykjavik, en même temps qu'a lieu la première représentation d'un opéra islandais ("Þrymskvida" de Jón Ásgeirsson). D'autres ensembles, dont Caput et l'orchestre de chambre d'Islande verront le jour dans les années 80 et sont invités à l'étranger. Des solistes, instrumentalistes ou chanteurs, se hissent à un niveau international. Les compositeurs ne sont pas en reste avec, entre autres, Hafliði Hallgrímsson qui remporte le concours Viotti en Italie en 1975 et Atli Heimir Sveinsson, lauréat du prix de composition du Conseil Nordique pour son concerto pour flûte. Ce prix sera également décerné à Björk en 1997 pour l'ensemble de son oeuvre.
De nos jours l'Islande compte des compositeurs et des interprètes de musique classique talentueux. Certains artistes contemporains, comme Ólafur Arnalds, mêlent des éléments de musique classique avec des sons électroniques et modernes.
La scène rock islandaise a connu un essor notable, avec des groupes comme Sigur Rós, Múm et Of Monsters and Men qui ont acquis une renommée mondiale.
L'Islande a également contribué à la scène électronique, avec des artistes comme Björk, qui est l'une des chanteuses et compositrices les plus célèbres du pays.
Des artistes tels que Ásgeir et Emilíana Torrini ont créé une musique populaire et folk qui incorpore des éléments islandais traditionnels tout en s'adaptant aux tendances contemporaines.